The Mississippi Sheiks

Publié le par Oyster

Dès lors qu'on s'intéresse au blues ou au folk, le nom des Mississippi Sheiks revient souvent - et avec lui, le parfum des années 30, de ses campagnes ocres et de ses noirs microsillons. Le titre Sittin' on top of the world vous dit quelque chose ? C'est eux. World is goin' wrong, Blood in my eyes for you ? Eux encore. De Robert Johnson au Grateful Dead, de Howlin' Wolf à Bob Dylan, le groupe fondé par les frères Chatmon au carrefour du blues, de la country et du folk n'a cessé d'influencer, avec ses grattes aigres et son violon mélancolique - éminemment dansant parfois -, jusqu'à venir me chatouiller le coeur près de huit décennies après sa dissolution.

J'aime les Mississippi Sheiks depuis un caniculaire été où, mettant le disque en marche pour accompagner ma sieste, j'en perdis tout simplement le sommeil. Je m'attendais, allez savoir pourquoi, à de lentes mélopées bercées de douces cordes et me retrouvais précipité en pleine fête de village, au bord d'une route flanquée de baraquements de guingois, ou au beau milieu d'un cabaret miteux avec alcools frelatés à volonté. Leur violon virevoltant, presque primitif me colla une furieuse envie de saisir le premier bout de bois venu pour en jouer comme si ma vie en dépendait. Ledit violon me fit d'ailleurs regretter d'avoir cessé la pratique de cet instrument des années auparavant. Nul doute que, si j'avais tenu les Mississippi Sheiks entre les mains du haut de mes treize ans, je n'aurais pas renoncé à mon archet aussi facilement.

Entre ambiance de valse rurale et complaintes fiévreuses dans la plus pure tradition du blues, nos joyeux drilles rappellent s’il en était besoin qu’au fondement de cette musique dite populaire, il n’est pas un genre mais plusieurs : comme si le folk, le blues, la country n’existaient pas en tant que styles autonomes. D’ailleurs, le rock qui en découlera n’existe pour ainsi dire pas. Et, pour enfoncer le clou, je rajouterai que ce sont les Mississippi Sheiks qui enregistrèrent la première version du standard Corrine Corrina, qu'ils jouèrent également sous le titre de Sweet Alberta... Un groupe fondamental donc, plein de poésie, d'allégresse et de tristesse, pour s'asseoir sur le toit du monde et verser une larme de nostalgie sur nos instruments délaissés.

 

 

 

Publié dans Eaux boueuses

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